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JOUR 2 - Camp d'Ah Nauk Ywe  

7 heures 30, nous prenons le bateau. Vingt minutes de trajet sont nécessaires pour atteindre l’entrée du camp de Ah Nauk Ywe. Nous montrons patte blanche au baraquement des autorités : photocopie de passeport, permis de travail. Sans ces derniers, impossible d’entrer.


Nous marchons sur plusieurs centaines de mètres, sous une pluie battante, sur les bords de champs surélevés. Notre parcours nécessite une vigilance de chaque instant afin de ne pas glisser et renforce le sentiment d’isolement auquel font face ces populations. Nous longeons péniblement un dédale d’abris délabrés avant de rejoindre nos équipes sur place. 

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Nous faisons connaissance avec les membres de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL recrutés au sein de la population déplacée. 23 personnes se tiennent devant nous. Nous faisons les présentations et l’équipe part ensuite en briefing sur le programme de la journée : campagne de nettoyage du camp et des latrines.​

Mary San, traductrice, nous accompagne et nous montre les installations des équipes de SOLIDARITÉS INTERNATIONAL : réhabilitation de points d’eau, stations de traitement de l’eau, robinets, distribution de filtres céramique, système de drainage, construction de latrines…


Le camp se situe juste au niveau de la mer et est donc régulièrement sujet aux inondations. C'est un champ de boue, il y a beaucoup de déchets, de morceaux d’abris, d’eau qui stagne sous les maisons, sur les chemins. Les enfants jouent au milieu de tout cela. On m’indique que 2 500 personnes vivent ici.
Nous partons à leur rencontre.

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Baraquement 9 - Abri 3 

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Dans cet abri vivent dix personnes. Un vieux carton déchiré fait office de cloison entre la cuisine et la pièce de vie. Le chef de famille tient à nous offrir à manger. Difficile d’accepter après qu’il nous ai raconté son histoire. Difficile de refuser sans le vexer. Nous acceptons quelques biscuits, touchés par cette générosité.


« Il y a trois mois ma maison a été détruite par le vent et la pluie. Il n’y avait plus de toit nous ne pouvions pas dormir à l’abri. Des proches nous ont donc accueillis chez eux. Nous sommes donc 10. » Un vieux carton abimé fait office de cloison pour obtenir un semblant

A notre sortie, nous recevons un appel. Les autorités du camp demandent où nous sommes. Ils nous disent se préoccuper de notre sécurité. Nous quittons le camp, toujours sous la pluie, qui tombe de plus en plus fort. Arrivés sur le bateau, nous ne pouvons prendre la mer par manque de visibilité. Nous patientons une bonne demi-heure avant que la pluie ne se calme à peu près et rentrons à Sittwe. J’ai respecté les consignes, je n’ai pas posé de questions embarrassantes ou politiques qui pourraient mettre en danger les familles. Me rendre dans ce camp m’en a déjà dit long sur les conditions de vie des familles, leur isolement et le contrôle de leurs faits et gestes.

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d’intimité. Tout en mâchant du Bétel il explique  « Seul mon fils a un travail. Moi je ne peux plus pécher, on m’en empêche. Je me fais attaquer par des personnes qui n’aiment pas notre ethnie. Comment puis-je nourrir ma famille si je ne peux pas sortir de ce camp pour trouver un travail, et si on m’empêche de pécher ? »


>> JOUR 3

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« Nous sommes huit à habiter ici, cela fait trois ans.
La nuit quand nous sommes tous allongés,
il ne reste pas un centimètre de libre ».  

Sous une pluie battante, nous nous réfugions chez une première famille déplacée. Nous nous déchaussons et nous installons dans un abri exigu de quelques mètres carrés. Des bâches plastiques, du tissu renforcent tant bien que mal les cloisons de bambou et empêchent l’eau de pénétrer à l’intérieur. Le sol en fibres tressées est fragile et manque de se percer à certains endroits. Deux pièces, une cuisine, une pièce de vie. Chaque recoin, chaque armature de l’abri est utilisé pour suspendre une casserole, un habit, un sac de provisions.

« J’ai 53 ans, mon mari est parti et je vis avec ma fille qui élève seule ses enfants. Nous n’avons pas de revenus. Cela fait près de trois ans que nous habitons là. Sans l’aide humanitaire, je n’aurais rien. Même pas de quoi manger. En saison des pluies, je peux collecter l’eau pour me laver et cuisiner, mais, pour boire, nous prenons l’eau des robinets mis en place par SOLIDARITÉS INTERNATIONAL. Les enfants ne sont pas malades grâce à cela. Parfois, je suis obligée de revendre un peu de nourriture si je veux acheter des médicaments ou d’autres choses qu’il nous manque ».

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